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Le sacrement du frère…

Au moment où j’écris ces quelques lignes, je viens de relire le passage d’Évangile que propose la liturgie de ce dernier dimanche du temps ordinaire : la parabole dite du « Jugement dernier » au chapitre 25 de l’évangéliste saint Matthieu.  Je viens de réentendre ces paroles bien connues de tous : « Venez, les bénis de mon Père…  J’avais faim, et vous m’avez donné à manger… J’avais soif, et vous m’avez donné à boire… J’étais un étranger et vous m’avez accueilli… J’étais nu, et vous m’avez vêtu… J’étais malade ou en prison et vous m’avez visité… ».   Et d’ajouter comme pour en souligner l’importance : « Chaque fois que vous l’avez fait à l’un de ces plus petits qui sont mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait. »

Au même moment, j’ai en tête ces images de chrétiens en France, à genoux, sur le parvis de quelques églises, les bras en l’air, revendiquant, en pleine pandémie, la réouverture des lieux de culte pour y célébrer l’eucharistie dominicale.  Je ne vous le cache pas : ces images me heurtent, me blessent et même me révoltent !  Christine Pedotti, éditorialiste de l’hebdomadaire Témoignage chrétien, n’hésite pas à qualifier ces actions de « mascarades de piété » menées par « quelques officines traditionalistes ou carrément intégristes » !  Une posture qui, en effet, laisse songeur.  Comment assumer en vérité, c’est-à-dire de manière évangélique, notre mission dans le monde alors que certains chrétiens revendiquent des passe-droits au moment où le quotidien de beaucoup de nos compatriotes, sur fond d’une pandémie sans fin, est la peur du chômage, de la misère, de bouleversements, qui laissent la jeunesse tragiquement aux prises avec un lendemain sans avenir ?

Au contraire, la privation provisoire de l’Eucharistie pourrait être l’occasion salutaire pour tous de reprendre conscience que la Parole de Dieu est, de façon tout aussi nécessaire, table de vie.  A ce propos, je ne saurais que trop recommander d’écouter sur la Radio RCF Sud Belgique le commentaire des textes du dimanche.  J’ai moi-même enregistré un tel commentaire pour le 2ème dimanche de l’Avent, dans le cadre de l’émission  L’Évangile aujourd’hui du dimanche à 11h30 : il suffit, pour l’écouter, de se connecter sur la FM 106.8 ou de suivre le lien suivant : https://rcf.fr/spiritualite/l-evangile-aujourd-hui pour réentendre l’émission à tout moment.

Cette privation est aussi une belle occasion d’expérimenter à neuf l’Église comme communauté de disciples.  De se rappeler mutuellement que l’on n’est pas chrétien en se recroquevillant sur l’entre-soi, mais en sortant comme le Christ en sortie d’Évangile.  Car la mission d’un chrétien a un nom que nous ne pouvons ignorer en ces jours de Fratelli tutti.  C’est la fraternité !   Le temps de l’Avent, qui s’ouvre ce dimanche 29 novembre, nous offre une occasion unique de nous en souvenir en participant activement, comme chaque année, à l’Action « Vivre Ensemble » d’Entraide et Fraternité présentée au verso de cette feuille et à l’Action « Noël dans la Cité » luttant contre la pauvreté à Namur.

Aux manifestants qui réclament leur dose de « messe » au mépris des risques sanitaires que cela représente, il faudrait rappeler que la messe n’est pas une fabrique de « Jésus ».  Elle est la célébration de ce que nous avons vécu - fort médiocrement souvent – et que nous unissons à la vie et à l’offrande du Christ.  La messe n’est pas un acte magique qui fabrique un sacré dont nous pourrions nous repaître.  La fraternité précède la célébration.  A celles et ceux qui manifestent, nous demandons simplement : « Qu’as-tu fait – ou que fais-tu - de ton frère ? »                                                          

 

Abbé Daniel Chavée